Soulagement pour les Français expatriés au Québec

Des militants du Nouveau Front populaire étaient réunis dimanche après-midi au pub L’Île noire, dans le Quartier latin de Montréal.
Photo: Adil Boukind Le Devoir Des militants du Nouveau Front populaire étaient réunis dimanche après-midi au pub L’Île noire, dans le Quartier latin de Montréal.

Des citoyens français ont poussé un grand soupir de soulagement lorsque sont apparus les résultats du second tour des élections législatives, dimanche après-midi, en direct à la télévision, à l’Union française de Montréal. Comme la majorité des expatriés au Québec, les électeurs à qui nous avons parlé sur place avaient voté pour la gauche afin de faire barrage à l’extrême droite.

« C’est un soulagement, j’en ai les larmes aux yeux », s’est exclamée Chantal Parret, venue assister à la soirée électorale au centre communautaire français de l’avenue Viger. « Le Rassemblement national aurait pu être majoritaire en France, dans le pays des droits de l’homme, de l’égalité. J’aurais eu honte de mon pays si c’était arrivé. » À ses côtés, Pierre Thevenet a renchéri : « On est contents pour nos enfants et nos petits-enfants. On avait très peur. »

Il n’était pas le seul. Tous les sondages donnaient le Rassemblement national (RN), parti d’extrême droite présidé par Jordan Bardella, vainqueur de ce scrutin. D’autant que le RN est arrivé en tête du premier tour la semaine dernière, un mois après sa victoire aux élections européennes — élections qui ont amené Emmanuel Macron à dissoudre l’Assemblée nationale à la surprise générale.

Photo: Adil Boukind Le Devoir Chantal Parret saute de joie lors du dévoilement des premières estimations des résultats du second tour des élections législatives, à l’Union Française de Montréal.

Roland Lescure réélu

À Montréal, où les électeurs français sont généralement plus favorables à la gauche que dans l’Hexagone, la victoire inattendue du Nouveau Front populaire (NFP), coalition de partis de gauche formée in extremis pour ce scrutin, a été plutôt bien reçue. Et ce, même si Oussama Laraichi, le candidat de la gauche des Français expatriés au Canada et aux États-Unis, n’a pas été élu.

C’est effectivement Roland Lescure, ancien vice-président de la Caisse de dépôt et placement du Québec et ministre français de l’Industrie depuis 2022, qui a été réélu député de la « première circonscription des Français établis hors de France », dont la métropole québécoise fait partie. Or, à Montréal seulement, M. Laraichi a obtenu 66,95 % des voix, contre 33,05 % pour M. Lescure.

Malgré leur défaite dans leur circonscription, les militants de la gauche rassemblés au pub L’Île noire, dans le Quartier latin, se disaient satisfaits, dimanche. « On est quand même heureux des résultats à la grandeur du pays. Je ne m’attendais pas à un tel score. Je reprends espoir », a lancé Pierre-Olivier Macé.

« Maintenant que les Français se sont exprimés, on a une certaine responsabilité, poursuit-il. Nous devons plus que jamais reconstruire la société française et prouver que la parole raciste qui s’est montrée ces dernières semaines, ce n’est pas la France. La balle est désormais dans le camp de nos dirigeants politiques. »

« J’ai voté contre quelque chose »

Plus au nord, dans les rues du Plateau-Mont-Royal, épicentre de la diaspora française au Canada, les électeurs que nous avons croisés étaient presque tous aussi soulagés.

« J’étais inquiète. Je craignais de rentrer en France dans un pays que je ne reconnaîtrais plus », a déclaré Frédérique Bruel, de Montpellier, dans le sud de la France, en voyage à Montréal depuis trois jours. D’allégeance écologiste, elle s’est rangée derrière le NFP pour contrer l’extrême droite : « Je n’ai pas tellement voté pour mes propres idées, mais plutôt contre quelque chose. Je suis quand même très contente. »

Seulement un groupe de Françaises, attablées au bar L’Barouf, se disaient carrément déçues. « On ne sait pas où la France va aller. Je ne sais pas si on se relèvera un jour », a confié Laurine Bosqué, partisane du RN, la mine basse. Son parti s’est non seulement retrouvé troisième à l’échelle du pays, mais il n’a récolté que 9,93 % des voix au premier tour à Montréal.

Photo: Adil Boukind Le Devoir Au bar L’Barouf à Montréal, des Français s’étaient réunis pour écouter la couverture électorale, dimanche.

Forte participation

Avec un peu plus de 75 000 électeurs inscrits pour voter au second tour, Montréal est au quatrième rang des villes du monde qui comptent le plus d’électeurs français à l’étranger, après Genève (132 000), Londres (121 000) et Bruxelles (104 000).

Lors du premier tour, Montréal a enregistré le plus haut taux de participation de tous les bureaux de la province de Québec et de la circonscription nord-américaine, à 42 %. Une participation aussi élevée était attendue au moment où ces lignes étaient écrites, tandis qu’elle atteignait 67,5 % partout en France, le plus haut taux depuis 1981.

Au total, quelque 1 600 000 citoyens français ont été appelés à voter dans l’une des 11 circonscriptions législatives des Français établis hors de France. Chacune de ces circonscriptions est représentée par un député à l’Assemblée nationale. Celle dont Montréal fait partie regroupe les électeurs français expatriés aux États-Unis et au Canada. Dimanche, 149 000 étaient inscrits pour voter aux États-Unis, et 116 000 au Canada, dont 92 000 au Québec. La France est l’un des très rares pays, avec l’Italie, qui accorde une représentation parlementaire à ses citoyens expatriés.

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