L’humanisme mozartien de Bernard Labadie
Bernard Labadie donnait dimanche son premier concert à Lanaudière depuis 2017. Ce retour avec Les Violons du Roy dans Mozart a été un pur régal.
Le premier concert dominical du Festival de Lanaudière rappelait, au fond, quelques enseignements simples après la soirée d’ouverture. Le plus important d’entre eux est assurément : « Il ne faut jamais s’excuser de ce que l’on est. » En d’autres termes, c’est le sommet de l’intégrité et de la qualité musicale qui définit les grandes manifestations ou institutions.
Un symbole
À ce titre, Bernard Labadie et sa présence en ces lieux dimanche sont des symboles. En effet, 2017 était le début de cette période où l’ancienne direction et l’ancien conseil d’administration du Festival avaient cru judicieux de confier cet emblème de la musique au pays à une direction artistique qui ne pensait qu’à en dévoyer la mission. La mise sur une voie de garage des Violons du Roy et de leur fondateur était une des conséquences des « flamboyantes » intuitions de ladite direction, heureusement fugace. Si Bernard Labadie était sur cette scène le 7 juillet 2024, c’est aussi parce que nous avons, depuis 2020, à la direction un tandem qui sait quelles sont l’essence et la mission du lieu.
Par rapport à l’instant, c’est-à-dire ce Festival 2024, l’après-midi de dimanche apportait un soulagement bienvenu en comparaison de la soirée de samedi. Même constat ici : laissons donc exprimer l’art qui nous rassemble. Les Violons du Roy et Bernard Labadie l’ont si bien fait que ce concert, d’un intérêt en teneur et en tenue musicale si nettement supérieur au concert d’ouverture, aurait sans doute eu sa place la veille au soir.
Évolutions
Bernard Labadie n’en finit pas de surprendre, et c’est un visage encore enrichi qu’il nous a présenté dimanche. Son Mozart, habituellement tonique, n’a pas perdu en précision et énergie, mais il a gagné beaucoup en souplesse, en détente et en humanité. Le chef, dès le 1er mouvement de la Petite musique de nuit, creuse avec gourmandise les nuances piano, ce qui lui permet de sculpter les phrases avec une grande élasticité. C’est un Mozart aux traits qui fusent. La musique est épicurienne, jamais tendue, stressée.
Il trouve en Kerson Leong un partenaire idéal dans le Concerto pour violon n° 5. Le violoniste originaire d’Ottawa, lui aussi, mise avec raffinement sur la gamme de dynamiques étendue que permet un creusement des nuances piano et pianissimo. Il agrémente la fin des mouvements de courtes et habiles cadences qui semblent de son cru.
Dans la 40e Symphonie, Bernard Labadie joue à fond le jeu des tensions et des détentes. La lisibilité polyphonique est magnifique, et on note que les trois premiers volets s’achèvent sur une balance faisant ressortir flûte et hautbois. Les cors sont présents sans trancher. Dans la structure, avec les reprises, le 2e mouvement devient le centre de gravité de l’oeuvre, dans tous les sens du terme. Tout cela nous donnait le tableau d’un Mozart d’une grande humanité dans un concert d’une tenue remarquable.