Au-delà des deux maux

«Encore plus près de nous, sur le plan personnel avec son impact sur la collectivité, quel choix de maux Donald Trump s’offrira-t-il, une fois élu ou non?» se demande l’auteur.
Photo: Andrew Caballero-Reynolds Agence France-Presse «Encore plus près de nous, sur le plan personnel avec son impact sur la collectivité, quel choix de maux Donald Trump s’offrira-t-il, une fois élu ou non?» se demande l’auteur.

Le roi d’Angleterre Henri VIII (1491-1547) laissait choisir à ses proches victimes la façon dont il se devait de mettre fin à leurs jours : ça lui donnait sans doute bonne conscience chaque fois. Du côté des prisonnières, placées ainsi face à cette éventualité, il s’agissait d’opter pour le moindre des maux.

Par contre, certains ont invoqué ce choix limité à titre de défense afin de justifier les atrocités dont ils ont été accusés et condamnés par la suite. Adolf Eichmann, par exemple, un des bourreaux nazis, prétendra qu’il n’avait que le choix entre obéir aux ordres ou être exécuté. L’expérience de Stanley Milgram, menée en 1963 à l’Université de Yale, a démontré que, pour une forte majorité d’entre nous, nous aurions fait de même, placés dans des circonstances semblables. Où en est la pensée collective dans ces cas ?

Revenons aux tortionnaires : poussant leurs suppliciés dans ces situations fermées, ils s’arrangent assez bien avec leur sens critique et leur morale, occupés qu’ils sont par leurs recherches intempestives d’un éventuel complot. Voilà pourquoi certains pourraient les qualifier de psychopathes.

Dans le dilemme du prisonnier, énoncé en 1950 par Albert W. Tucker, à Princeton, il est question également de cet acquiescement entre l’un des deux maux présentés, cette fois, par un juge. Les deux virtuels brigands sont placés par l’homme de loi devant ce composé binaire, c’est-à-dire résumé à deux éléments, et donc à choisir entre l’un des deux maux, et ce, en deux mots de leur part.

Il en est de même pour ceux et celles qui souffrent d’une quelconque dépendance, en avançant cette argutie : « C’est plus fort que moi, c’est ça… ou rien ! » À court terme, ils choisissent le bénéfice immédiat, cependant à long terme, l’assuétude aliénante s’installe subtilement. Entre le vide ressenti et le fait de s’accrocher à une personne ou à une substance ou à un autre objet, l’enfer, l’enfermement persiste de plus en plus.

Nous pourrions relier ces différentes situations énumérées ici aux expériences de Pavlov (1849-1936) sur les réflexes conditionnés. L’animal intercepté se verra limité à résister à sa faim ou à manger. Dans ce dernier cas s’ensuivra alors le dressage, dans lequel il y a indubitablement manipulation de la part de l’expérimentateur.

Sur le plan personnel, il vaut mieux ne pas avoir à vivre une telle éventualité. Nous restons alors enfermés dans notre monde intérieur et donc coupés du reste du monde : il nous faudra choisir entre deux maux. Toute personne convenable se doit d’agrandir une telle réalité, soit par elle-même, soit avec l’aide de quelqu’un d’autre, quand cela est possible.

Parce qu’au-delà des deux maux existe un autre monde, celui de la liberté.

Plus près de nous et actuellement, Vladimir Poutine a à choisir entre, d’une part, cesser sa guerre en Ukraine, tout en renonçant ainsi à sa recherche obsessionnelle du pouvoir et, d’autre part, faire face dangereusement à l’accusation de crime de guerre. Quelle sera sa décision, pensez-vous ?

Encore plus près de nous, sur le plan personnel avec son impact sur la collectivité, quel choix de maux Donald Trump s’offrira-t-il, une fois élu ou non ?

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