L’ancien président français François Hollande élu député
Après avoir connu les sommets du pouvoir, l’ex-président socialiste français François Hollande a retrouvé dimanche un simple siège de député, sous la bannière de l’alliance de gauche Nouveau Front populaire, réussissant son retour en politique.
Sept ans après avoir laissé les clés de l’Élysée à Emmanuel Macron, l’ancien chef de l’État (2012-2017), âgé de 69 ans, a recueilli 43,10 % des suffrages, devançant la candidate d’extrême droite et le député sortant de droite Les Républicains.
« Je ne serai pas un député comme les autres, c’est sûr », concède à l’Agence France-Presse (AFP) l’ancien président de la République.
Face à une « situation exceptionnelle » — la convocation par M. Macron de législatives anticipées et la probabilité d’une majorité pour l’extrême droite -, il dit avoir pris une « décision exceptionnelle » : reconquérir l’écharpe de député en Corrèze (centre-ouest), qu’il avait portée de 1988 à 1993 puis de 1997 à 2012.
Silhouette épaissie et oeil rieur, on l’a vu, durant la campagne, regoûter au « plaisir » d’une popularité retrouvée : selfies, poignées de main et bière bue cul-sec.
« Il ne faut absolument pas sous-estimer la capacité de rebond du personnage », analysait le politologue Jean Petaux.
Qu’il semble loin le président le plus impopulaire de la Ve République (régime en vigueur en France depuis 1958), qui était crédité de 4 % de satisfaction en 2016.
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« Addict »
C’est au plus bas des sondages qu’il avait débuté sa campagne présidentielle en 2011, avant l’impensable retrait du favori socialiste Dominique Strauss-Kahn, rattrapé par le scandale du Sofitel à New York où une femme de ménage l’a accusé de viol.
L’ex-conjoint de l’ancienne candidate socialiste à la présidentielle de 2007 Ségolène Royal (mère de ses quatre enfants), est alors élu sur une promesse de rupture avec le président de droite Nicolas Sarkozy.
François Hollande entame une présidence décrite comme « normale », loin du « bling-bling » de son prédécesseur.
Il se retrouve pourtant à la Une de la presse People en 2014 où des photos volées le montrent rendant visite en toute discrétion, le visage caché par son casque de scooter, à sa maîtresse devenue depuis son épouse, Julie Gayet, actrice, réalisatrice et productrice.
La compagne trahie de François Hollande, Valérie Trierweiler, publie peu après « Merci pour ce moment », un livre au vitriol dévoilant sa vie à l’Élysée.
Les mouvements de rejet vont aussi empoisonner son quinquennat : mobilisation conservatrice contre le mariage homosexuel ; virage social-libéral très critiqué à mi-mandat ; polémique sur la déchéance de nationalité pour les terroristes binationaux…
Jusqu’à son renoncement à se représenter, en décembre 2016, après la « trahison » de son ancien ministre de l’Économie Emmanuel Macron. Ce dernier, déterminé à bousculer les clivages traditionnels droite-gauche, décidait de quitter le gouvernement et de se présenter à la présidentielle. Qu’il a remporté en 2017.
« Je n’ai aucun compte à régler. Pas du tout. Tout ça est passé », promet M. Hollande.
Le voilà réélu à l’Assemblée nationale, premier ex-président à y siéger depuis Valéry Giscard d’Estaing en 1984.
Pendant cette parenthèse de sept années, il a lancé une fondation « La France s’engage », écumé lycées et universités, écrit plusieurs livres. Sans jamais écarter un retour.
« Ça fait sept ans qu’il tourne autour », grince un de ses anciens conseillers. « C’est un garçon addict qui pense que d’une meurtrière on peut faire une baie vitrée. »
« Star du rock »
François Hollande a connu « la drogue dure de l’Élysée pendant cinq ans », confirme Jean Petaux, qui lui a souvent donné la réplique lors de conférences. « J’ai toujours pensé qu’il voulait revenir », dit-il, décrivant une « espèce de star du rock », suscitant des files d’admirateurs venus décrocher un autographe.
Depuis, une partie de son bilan a été réhabilitée : déficit budgétaire maîtrisé ; refus dès 2015 de livrer des navires de guerre Mistral à la Russie de Vladimir Poutine…
Les guerres et les attentats ayant endeuillé son mandat, de Charlie Hebdo au Bataclan, l’ont aussi fait gagner en gravité. « La mort habite la fonction présidentielle », a-t-il imagé.
À bientôt 70 ans, ce fils d’un médecin d’une droite dure, pro-Algérie française, et d’une assistante sociale à « l’âme généreuse », ne se voit pas s’arrêter.
« Il faut pas mal de hauteur de vue pour retourner à la base en se relégitimant auprès des électeurs », veut croire Gaspard Gantzer, son ancien communiquant à la présidence. « Ça le met au coeur de tout processus de reconstruction de la gauche, et même du pays ».