Le Rassemblement national préfère voir le verre à moitié plein
Les sondages lui prédisaient une confortable majorité à l’Assemblée nationale. Les résultats du second tour ont finalement fait déchanter les partisans du Rassemblement national (RN) puisque le parti d’extrême droite totalisera au maximum 145 sièges… bien loin des 289 nécessaires à une majorité absolue. Mais même perdant, le parti de Jordan Bardella a-t-il réussi son coup ?
« Ils ont perdu une bataille, mais ils sont loin d’avoir perdu la guerre », résume Frédéric Mérand, directeur du Département de science politique à l’Université de Montréal.
Au soir du second tour en effet, le Rassemblement national (RN) fait partie des perdants de ces élections législatives anticipées.
Pourtant, le RN totalise 143 députés, maintenant le comptage des voix complété.
Le parti d’extrême droite va ainsi doubler son contingent à l’Assemblée nationale, en plus d’avoir réussi à imposer ses thèmes de prédilection (insécurité, immigration, souveraineté, etc.) durant la campagne électorale.
« Notre victoire n’est que différée »
À l’issue du second tour des élections législatives qui a placé son parti en troisième position, Marine Le Pen a estimé que la victoire du Rassemblement national « n’est que différée ».
Selon elle, « la marée […] continue à monter et, par conséquent, notre victoire n’est que différée, a-t-elle déclaré au réseau TF1. J’ai trop d’expérience pour être déçue par un résultat où nous doublons notre nombre de députés ».
Même constat pour Jordan Bardella, qui a fortement été pressenti lors de l’entre-deux-tours pour devenir le nouveau premier ministre.
Devant ses partisans, l’eurodéputé a salué « la dynamique qui porte le RN, et qui l’a mis en tête du premier tour » et lui permet d’obtenir un nombre historique de députés.
« Ce soir, tout commence, a-t-il prévenu. Ce soir, un vieux monde est tombé, et rien ne peut arrêter un peuple qui s’est remis à espérer. »
Un vieux monde est tombé, mais un plafond de verre semble toutefois subsister.
Plafond de verre encore et toujours
Comme au soir du second tour de l’élection présidentielle de 2017 et de 2022, le parti fondé par Jean-Marie Le Pen n’a donc pas réussi à briser la barrière qui le sépare encore du pouvoir, qu’il s’agisse de l’Élysée ou de Matignon dans ce cas.
Malgré les manoeuvres de dédiabolisation du parti amorcées par Marine Le Pen depuis sa prise de pouvoir en 2011, le Rassemblement national n’a pas validé au second tour les espoirs nés le soir d’un premier tour.
Surtout, la stratégie « Tout sauf le RN » a encore porté ses fruits auprès des électeurs modérés, privant le parti de Jordan Bardella de nombreux sièges de députés malgré un premier tour qu’il avait fini en tête avec plus de 33 % des suffrages exprimés.
Le RN paie encore un manque de réserves de voix entre les premier et second tours, ce qui le tient à distance du pouvoir. Mais pour combien de temps encore ?
Quelle stratégie pour 2027 ?
Désormais premier parti de France en nombre de députés, le RN va toutefois avoir un rôle prépondérant à l’Assemblée nationale.
« C’est le parti le plus puissant de France, explique M. Ménard, qui ne voit pas le RN s’arrêter en si bon chemin.
« Avec un parlement dysfonctionnel comme ça risque d’être le cas, le contexte risque de nourrir le discours du Rassemblement national contre les élites. »
L’absence de majorité à l’Assemblée nationale risque donc de jouer en sa faveur. Reste à savoir si le parti de Marine Le Pen arrivera à tirer parti de cette instabilité afin de se mettre sur la voie royale en vue de la prochaine élection présidentielle de 2027.