Voyager un verre à la main

Sophie Ginoux
Collaboration spéciale
Les Géorgiens font fermenter le vin dans des amphores en argile appelées qvevris.
Photo: Getty Images Les Géorgiens font fermenter le vin dans des amphores en argile appelées qvevris.

Ce texte fait partie du cahier spécial Plaisirs

Cette semaine, cap sur le monde… vinique ! Nous vous invitons cependant à sortir des sentiers battus et à découvrir ou redécouvrir des destinations à travers des cépages moins connus. Et pour les dénicher, nous avons fait appel à la sommelière et chroniqueuse la plus aventurière du Québec, Natalie Richard. On lui doit déjà une bonne centaine d’itinéraires de voyage viticole à travers la planète grâce à sa série de guides Routes des vins.

Vins de qvevri, en Géorgie

Commençons notre balade vinique dans un petit pays du Caucase, en Asie occidentale, entre la Russie, la Turquie, l’Arménie et l’Azerbaïdjan. La Géorgie n’est pas très touristique ; il faut même être assez audacieux pour vouloir y passer ses vacances. Mais elle est considérée comme le berceau mondial de la viticulture. C’est en effet à cet endroit que des fouilles archéologiques ont mis au jour les traces les plus anciennes (plus de 8000 ans) de vins, avec la découverte de jarres et d’amphores dans lesquelles ils fermentaient.

Eh bien, 8000 ans plus tard, les Géorgiens, dont on dit qu’ils font tous du vin dans leur cour, en font toujours fermenter dans des amphores en argile, à l’extrémité conique, que l’on nomme qvevris. Pouvant contenir de 1000 à 6000 litres de grappes de raisin écrasées ou non, les qvevris sont enfouies dans le sol de caves ou à l’air libre. Cela permet de garder une température constante d’environ 13 à 15 degrés, idéale pour une fermentation naturelle sans additifs.

« Cette méthode donne aussi à ces vins une typicité particulière, explique Natalie Richard. On y trouve notamment des vins nature orange [des vins blancs vinifiés comme des vins rouges] élaborés à partir de cépages autochtones. Ils ont un côté oxydatif et beaucoup de saveur. »

Pour s’initier à ces produits particuliers sous la barre des 20 $, la sommelière recommande le Teliani Valley Winery 97 Kakhuri, aux arômes de fruits mûrs à noyau, tropicaux et secs, d’épices et de tanins frais. Avec quoi s’accordent-ils ? « Des fromages vieillis et persillés, comme l’époisses ou le 14 Arpents », répond l’experte.

Photo: Heidi Hollinger La sommelière Natalie Richard

Le roditis, en Grèce

Traversons à présent la mer Noire et rendons-nous en Grèce, une terre bien connue des touristes et des amateurs de vin. « Du moins, en apparence », ajoute Mme Richard. Elle se souvient, comme beaucoup de Québécois, des premiers vins grecs bon marché qu’elle achetait quand elle allait au cégep : les retsinas, des blancs ou rosés légers au goût un peu âpre, franc et résineux.

Par la suite, la sommelière a découvert les assyrtikos, des blancs frais à la fois vifs et riches originaires de l’île de Santorin. « Mais il y en a d’autres, tout aussi intéressants, comme le roditis du Péloponnèse, vinifié autrement qu’en retsina », explique-t-elle. Effectivement, ce raisin à la peau rosée, utilisé pour produire plusieurs vins traditionnels grecs, peut se présenter sous la forme de blancs frais, bien minéraux et, surtout, sans trace de résine, ce qui change radicalement la dégustation.

« Le Tetramythos Roditis Patras est un bon exemple de cette vinification différente. Il s’accordera très bien avec des homards, des crustacés et des calamars frits », conseille Natalie Richard.

Le Furmint, en Hongrie

La Hongrie fait partie des destinations touristiques prisées en Europe. Destination sûre et économique — le coût de la vie y est moins cher qu’en France —, elle héberge de nombreux sites classés au patrimoine mondial de l’UNESCO, dont sa capitale, Budapest.

La Hongrie est également un pays viticole, avec un vin phare connu un peu partout, le tokai ou tokaji. Liquoreux avec une pointe d’acidité distinctive et des arômes intenses de miel, d’abricot et de marmelade d’orange, le tokaji a longtemps été le vin des rois (dont Louis XIV) et des tsars.

Mais le cépage furmint avec lequel il est souvent élaboré peut aussi être vinifié en vin blanc sec, comme le prouve par exemple le Pajzos Furmint Tokaji, à un prix très doux. « En bouche, ces vins parfaits pour le printemps et l’été ressemblent au riesling. Ils ont une belle minéralité et dégagent des notes de pomme verte, de citron Meyer et de fumée. Ils accompagnent bien des poissons, des crevettes, du saumon fumé ou encore une salade de tomates avec de la burrata et un trait d’huile d’olive », conseille la sommelière.

Le Nerello mascalese, en Italie

Prosecco, chianti, pinot grigio, lambrusco, barolo, brunello, amarone, valpolicella… Les vins italiens, tout comme les riches gastronomies régionales de l’Italie, sont bien connus des Québécois. Ce qui n’empêche pas d’avoir parfois de bonnes surprises. Saviez-vous, par exemple, que l’on produit des vins sur les coteaux du volcan Etna en Sicile ?

« Cette viticulture extrême, réalisée avec le cépage phare nerelo mascalese, donne des vins rouges que l’on pourrait comparer à du pinot noir. Elle résulte en des tanins doux et des arômes de cerises séchées, de zeste d’orange et d’épices », explique l’experte, qui en sert avec des viandes rouges grillées. Sa suggestion ? Le Flavia Rebellious wines Etna Rosso, qui se vend d’ailleurs en format d’un litre.

Le Bobal, en Espagne

Terminons nos trouvailles avec l’Espagne, que Natalie Richard a arpentée, en même temps que le Portugal, pour rédiger son prochain guide, qui paraîtra le 16 août. Avec près d’un milliard d’hectares de vignes en 2021, la péninsule Ibérique est en tête du classement mondial des pays viticoles en matière de production.

« Mais il est faux de croire que l’on connaît tous les vins d’Espagne, dit la sommelière. Oui, on pense souvent au tempranillo, car il est utilisé pour fabriquer du rioja, et à la grenache ainsi qu’au monastrell. Mais le bobal, un des cépages phares de la région sud-est du pays, la Valence, donne des rouges fruités intéressants, qui ont du corps et une bonne acidité », souligne-t-elle.

Les notes de mûres, de grenade et de thé noir que l’on retrouve par exemple dans l’Aranléon Solo Utiel-Requena se marieront à merveille avec des burgers et des grillades de viande rouge ou blanche. Bonnes découvertes !

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.

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