Trois-Rivières, championne de la création de places en garderie
La Ville de Trois-Rivières vient de remporter un prix en économie à la suite de ses efforts pour soutenir les garderies en milieu familial. À elle seule, elle a créé 11 % de toutes les nouvelles places développées depuis 2021.
Pas mal pour une ville qui compte pour 1,6 % de la population du Québec, note Pierre-Philippe Foucher, directeur général du bureau coordonnateur du CPE Les Petits Collégiens.
En deux ans, les initiatives de Trois-Rivières ont permis d’ajouter au moins 114 milieux et environ 700 places sur son territoire sur les 6190 recensées à la grandeur de tout le Québec au cours de la même période.
« C’est vraiment dans l’optique du développement économique que nous sommes allés de l’avant », explique le maire, Jean Lamarche.
L’initiative a été lancée en 2022 à la suggestion d’une conseillère municipale, Maryse Bellemare. Dans son secteur, cette dernière se faisait souvent interpeller par des parents incapables de trouver des places pour leurs enfants.
« On était sur le seuil du plein-emploi à 5 %, 4,8 % », relate le maire. « On en a conclu qu’il fallait permettre à ces gens de réintégrer le marché du travail, à la vitesse qu’ils souhaitaient. »
Et, « on va se le dire » : « ce sont surtout des femmes, parce que souvent ce sont les mères qui font le choix de rester à la maison », signale-t-il.
À lire aussi
La Ville a injecté 100 000 $ dans l’aventure. Elle s’est associée à deux bureaux coordonnateurs ainsi qu’à Desjardins (50 000 $ de plus) pour offrir un soutien de 4600 $ au démarrage d’un nouveau service de garde en milieu familial.
Lorsqu’on ajoute l’aide du ministère de la Famille (3500 $), cela porte à 8100 $ l’aide par projet.
Le programme a été baptisé « Propulsion services de garde en milieu familial ». En mai, l’Union des municipalités du Québec (UMQ) lui a décerné un prix Mérite Ovation municipale dans la catégorie Vitalité économique.
Pour la Ville, qui a été secouée par de vifs conflits internes entre élus ces dernières années, ce succès est visiblement une grande source de fierté.
De la formation pour les nouvelles et de la reconnaissance pour les anciennes
L’aide ne se limite toutefois pas à des fonds. Trois-Rivières a aussi déployé des efforts pour valoriser le travail des milieux familiaux.
En juin 2022, la Ville a organisé une activité de reconnaissance pour les responsables de services de garde en milieu familial (RSG) en exercice depuis de nombreuses années.
« On remettait une gerbe de fleurs et une plaque aux gens qui avaient des services de garde puis on les nommait : celles qui étaient en activité depuis cinq ans, dix ans, quinze, vingt ans… »
Jean Lamarche raconte avoir été touché par la réaction très émotive de certaines des femmes honorées. « Il y a des gens qui m’ont pleuré dans les bras. »
« C’est là que j’ai compris. Elles me parlaient beaucoup d’isolement, elles ne voyaient pas qu’elles faisaient partie d’un ensemble », poursuit-il.
« Quand on fait des activités comme ça, je pense que ça crée un climat de solidarité qui peut sûrement aider de temps en temps quand les moments sont durs. »
Une centaine de responsables ont en outre reçu une aide de 1000 $ en soutien administratif ainsi que des cartes-cadeaux.
Quant aux nouvelles responsables RSG, elles non plus ne reçoivent pas que de l’argent. Le bureau coordonnateur offre toutes sortes de mesures de soutien, comme des formations gratuites et des activités extérieures déjà prévues pour les petits, explique Pierre-Philippe Foucher, du bureau coordonnateur Les Petits Collégiens.
À cela s’ajoutent des mesures d’accompagnement pour les nouveaux venus. « Si c’est quelqu’un qui décide de déménager dans la région, on va aider son conjoint à chercher un travail, on les oriente vers les agents immobiliers », signale M. Foucher. « Lorsque les gens viennent de l’extérieur et que c’est difficile pour le français, on les oriente vers les cours de francisation. »
Le rôle des villes
Ravis par les résultats du programme, ses artisans comptent poursuivre leurs efforts au cours des prochaines années. Après tout, il reste encore des centaines de places à pourvoir dans la région.
« Pour ma part, tant que le besoin est là — et il semble être encore là —, on continue », affirme Jean Lamarche. En mai, le programme a été reconduit dans le but de créer 35 milieux familiaux de plus.
Reste à savoir si c’est le rôle des villes d’assumer un tel rôle. La mairesse de Nicolet, Geneviève Dubois, estimait en janvier 2023 qu’il fallait faire attention.
« Nos citoyens à travers leurs impôts subventionnent déjà les CPE. […] Chacun ses compétences, chacun ses responsabilités. »
Pour ma part, tant que le besoin est là — et il semble être encore là —, on continue.
Nicolet aussi en a fait beaucoup pour créer des places ces dernières années en créant un fond de 100 000 $ pour soutenir l’ouverture de nouvelles garderies ou encore des agrandissements.
Or Mme Dubois juge que l’aide doit rester ponctuelle pour éviter qu’une telle charge soit transférée dans la cour des villes pour de bon. Depuis, Nicolet a quand même reconduit l’aide puisqu’il y avait encore de la demande et qu’il restait des fonds dans le programme.
Questionné à ce sujet, le maire de Trois-Rivières, Jean Lamarche, rétorque « qu’à la fin », c’est sa ville qui « reste prise avec l’enjeu ». « Malheureusement on a l’obligation d’être créatifs puis innovants, et de trouver de nouvelles façons de faire. »