Tanière3 couronné Restaurant de l’année au Québec

Amélie Revert
Collaboration spéciale
L'équipe de Tanière3
Photo: Paul Ducharme L'équipe de Tanière3

Ce texte fait partie du cahier spécial Plaisirs

Les Lauriers de la gastronomie ont récompensé lundi dernier 17 lauréats lors du grand gala, dont l’établissement de Québec Tanière3, qui a reçu le titre de Restaurant de l’année. Une poignée d’entre eux offrent ainsi leur vision d’une industrie en pleine effervescence.

« On ne travaille pas pour les prix, mais ça fait du bien de se faire reconnaître par l’industrie, surtout quand l’attention médiatique est généralement portée sur Montréal », confie pour sa part François-Emmanuel Nicol, chef de Tanière3, qui a reçu le Laurier du Restaurant de l’année sur la scène du New City Gas lors de la cérémonie. « Il y a des choses qui se font partout au Québec ! » s’exclame-t-il.

Pour lui, la gastronomie québécoise est ancrée dans le terroir et met en avant des saveurs agricoles et sauvages. « Tanière3 est presque à 100 % local et, pour nous, le luxe, c’est de trouver une petite plante que personne ne connaît », explique-t-il. D’après lui, il y en a une centaine dans la province, « comme la matricaire odorante, qui pousse dans les craques du trottoir et goûte l’ananas et la camomille ». Le secret de la réussite serait, pour lui, de se forger une identité propre au lieu de faire ce qui se fait déjà ailleurs.

Fisun Ercan, de Bika Ferme & Cuisine en Montérégie, qui vient d’être désignée cheffe de l’année par les Lauriers après avoir été finaliste pendant quatre ans, défend également les produits québécois. « Je fais une cuisine locavore inspirée de la cuisine turque, qui est une vraie mosaïque entre mes origines et mon enracinement ici », indique-t-elle. Plutôt que d’envisager une recette ou une nationalité, elle préfère inventer en fonction de ce qui l’entoure. « Puisque je nourris le public, je me sens responsable de la nature, de l’environnement », estime la cheffe de 55 ans, qui assure tous les jours, sans exception, le service en cuisine. En ne gardant que l’essentiel dans ses plats, Fisun Ercan est ainsi actrice d’une gastronomie québécoise qui se diversifie de plus en plus. « Tout le monde fait un pas devant et ça va très vite. Le futur n’a pas à avoir peur », affirme-t-elle avec beaucoup d’espoir malgré les défis et les difficultés du milieu.

Mon Lapin encore primé

« On a ce privilège d’être dans un milieu où tout est encore possible », dit Vanya Filipovic, du restaurant Mon Lapin à Montréal, qui a reçu le prix de Sommelière de l’année. Il s’agit par ailleurs du troisième trophée pour l’établissement cette année, lui qui a récemment été désigné meilleur restaurant du Canada, et dont Vanya Filipovic et son collègue et associé Alex Landry ont été nommés meilleurs sommeliers du pays au palmarès Canada’s 100 Best. « Au Québec, il n’y a pas de traditions poussiéreuses ou de vieilles boîtes dans lesquelles on doit exister. C’est vraiment une chance », souligne-t-elle.

Photo: Paul Ducharme Vanya Filipovic

Selon Vanya Filipovic, c’est parce que l’industrie est nouvelle qu’elle est si intéressante. « Par exemple, la SAQ et l’UPA ont cent ans, mais c’est très jeune. C’est super de voir tous ces mouvements, toutes ces générations différentes qui apportent leur touche et font que la gastronomie québécoise est en pleine ébullition », constate celle qui ne voudrait exercer son métier nulle part ailleurs. Et de poursuivre, avec enthousiasme : « À l’ère où les consommateurs sont de plus en plus connectés avec ce qu’ils mangent, le Québec, grâce à la richesse de son terroir et de ses agriculteurs, est un endroit incroyable. »

Cette fille de restaurateurs s’épanouit donc dans un milieu qui lui permet de continuer la sommellerie avec fierté et humilité et de proposer une vision singulière. « Mon Lapin, c’est notre point de vue, les vins qu’on aime, notre propre façon de faire », raconte Vanya Filipovic. Dans son établissement, la carte est en effet pensée avec des crus dans lesquels l’équipe croit, tout simplement. « Nous avons des vins à ouvrir, à boire et à partager maintenant, qui vont faire plaisir aux gens. Pas un inventaire de toutes nos références en cave… » Pour elle, les vignerons et vigneronnes québécois font, de fait, partie intégrante de l’équation. « Eux aussi sont au tout début de leur aventure avec nous », affirme-t-elle.

L’amour, toujours

Élise Tastet, prix du Rayonnement de la culture culinaire grâce à son site Tastet et à son application lancée il y a quelques jours, remarque de son côté l’évolution d’une industrie québécoise très créative, « qui fait beaucoup avec très peu » et qui est de plus en plus multiculturelle. « En immigrant, les gens de partout amènent la richesse de leur gastronomie », observe-t-elle.

Photo: Paul Ducharme Elise Tastet

De cette manière, le Québec a tout à fait sa place à l’échelle internationale, elle en est convaincue. Pour sa part, Roxan Bourdelais, directeur de la restauration à Tanière3, pourfend l’idée préconçue d’une gastronomie québécoise élitiste et guindée. « Elle est plutôt synonyme d’amalgame, car on la mange, mais elle renferme aussi une part de tradition, de culture, et une part d’humanité », dit-il. Pour lui, le contenu d’une assiette n’en est que le véhicule.

Enfin, Élise Tastet décrit une gastronomie généreuse, « du bon vivant avec une hospitalité qu’il n’y a qu’au Québec, et c’est très précieux ». La preuve, s’il en fallait une, avec Janette Bertrand, qui s’est vu remettre des mains de Christian Bégin le Laurier Hommage 2024. Et ce, notamment pour avoir libéré les femmes de leur cuisine avec son livre Les recettes de Janette, paru en 1968 et vendu à des centaines de milliers d’exemplaires. « Cuisiner, c’est aimer », a dit plusieurs fois sur scène Janette Bertrand. Et personne pour la contredire.

Photo: Paul Ducharme Janette Bernard et Christian Bégin

Palmarès des Lauriers 2024

• Restaurant de l’année : Tanière3, Québec
• Cheffe de l’année :
Fisun Ercan de Bika Ferme & Cuisine, Saint-Blaise-sur-Richelieu
• Laurier Hommage 2024 : Janette Bertrand
• Laurier du public : Geneviève Everell
• Révélation de l’année : Chloé Ouellet d’Au Pâturage, Sainte-Perpétue
• Cheffe pâtissière de l’année : Gabrielle Hiller-Rivard de La Cabane sur le Roc, Saint-Joseph-du-Lac
• Boulanger de l’année : François Borderon de Borderon & fils, Québec
• Sommelière de l’année : Vanya Filipovic de Mon Lapin, Montréal
• Mixologue ou bartender de l’année : Simon Faucher de Tanière3, Québec
• Prix du meilleur service : Mélanie Blanchette de Bouillon Bilk, Montréal
• Brasseur, vigneron ou producteur de boissons de l’année :
Samuel Lavoie de la Ferme Le Raku, Saint-Germain-de-Kamouraska
• Producteur de l’année : Patrice Fortier de La Société des plantes, Kamouraska
• Artisane de l’année : Nathalie Joanette de Fou du cochon, Sainte-Anne-de-la-Pocatière
• Entreprise ou initiative de l’année : La Table Ronde
• Prix du rayonnement de la culture culinaire : Élise Tastet de Tastet, Montréal
• Événement gastronomique de l’année : Rendez-vous Loup Marin, Îles-de-la-Madeleine
• Prix du tourisme gourmand : Maison de Soma, Mont-Tremblant

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