Des artistes au public, les relationnistes
Ils passent inaperçus, ou presque. Ce sont pourtant des acteurs essentiels du milieu culturel. Le Devoir propose une série de portraits de métiers de l’ombre, à travers les confidences de professionnels qui les pratiquent ou les ont déjà pratiqués. Aujourd’hui : les relationnistes.
« Nous nous occupons de la place qui existe entre la culture et les journalistes, les médias », dit à propos de son métier la relationniste Rosemonde Gingras, à la tête de Rosemonde communications, qui compte notamment l’Espace Go et le Musée de la civilisation parmi ses clients. Par extension, la profession d’attaché de presse est l’intermédiaire privilégié qui permet aux artistes d’atteindre leur public. « La connaissance fine de ce milieu, c’est nous qui l’avons », explique celle qui suit sa vocation depuis une vingtaine d’années. Et de poursuivre : « Je comprends aujourd’hui que j’étais destinée à ce travail, car il répond à ma boulimie pour la culture dans tous ses aspects. » Selon elle, il n’y aurait, de fait, pas de meilleure position pour entretenir le contact avec l’ensemble des personnes clés de la culture.
« Je suis toujours en train de réfléchir à comment je peux connecter les choses et les gens afin de les faire valoir dans l’espace public », explique Rosemonde Gingras. En résumé, les relationnistes ne comptent pas leurs heures, et leur dévouement est entier.
Quel est le contexte ? Quel est le message à faire passer ? Quels sont les outils à disposition ? Quel chemin emprunter ? Toutes ces interrogations font ainsi partie du quotidien bien rempli d’un relationniste. « Il y a aussi les communiqués, les événements médias, le déploiement des stratégies, la valorisation », souligne Rosemonde Gingras. La mission première d’un attaché de presse est en effet d’intéresser et de convaincre les journalistes grâce à une information percutante et précise.
« Tout le monde est capable de faire une liste de presse. Ce n’est pas ça, être relationniste », fait pour sa part remarquer Caroline Rompré, fondatrice de l’agence PixelleX communications, spécialisée en cinéma. Celle-ci parle plutôt d’un lien de confiance qui se bâtit au fil des années avec les journalistes et les médias. « Le cliché de l’attaché de presse qui envoie un communiqué et qui attend que les choses se passent, non. Ce n’est pas notre réalité », indique-t-elle. Il faut, au contraire, être toujours disponible, car il n’est pas envisageable de perdre une entrevue ou une possibilité de couverture, mais aussi bien connaître chaque journaliste, avec ses habitudes et ses intérêts.
Souvent, je fais bien plus que des relations de presse et j’ai presque un côté coach
« Nos clients ne maîtrisent pas forcément l’ensemble de l’écosystème des médias, donc notre plus-value se trouve ici », estime justement Olivier Lapierre, qui travaille dans les secteurs du tourisme, de l’aménagement, des arts visuels et des festivals et qui a eu l’appel des relations publiques dès son plus jeune âge, à force de « consommer » les médias tant francophones qu’anglophones. « Je passe un tiers de mon temps à consulter la presse locale et internationale, car il y a toujours des enjeux qui peuvent intéresser nos clients pour mieux faire passer leur message », confie-t-il.
Pour ce relationniste indépendant, ces compétences médiatiques pointues sont aussi un gage évident d’efficacité. « L’information ne doit pas se rendre à tous les journalistes du Québec, mais aux plus pertinents », soutient-il.
De précieux conseils
Fort de plusieurs années d’expérience au sein de la scène musicale québécoise et française, Jérémy Spellanzon, coordonnateur des relations de presse à POP Montréal et relationniste indépendant, aime faire bénéficier de son vaste réseau les artistes avec lesquels il collabore. « Souvent, je fais bien plus que des relations de presse et j’ai presque un côté coach. J’établis un lien de communication entre tout le monde, pas seulement avec les médias, pour que chacun rencontre les bonnes personnes », dit-il avec enthousiasme. Lorsqu’il défend un projet, il ne mise pas tout sur les relations de presse, mais sur un travail d’équipe avec toute la communauté.
Cette vision inclusive et bienveillante est également partagée par Caroline Rompré, qui met un point d’honneur à accompagner les cinéastes dont elle gère la promotion. « Je suis présente à leurs côtés pendant les ciné-rencontres, par exemple, et je suis de plus en plus impliquée dans les stratégies et le calendrier de sortie des films », ajoute-t-elle. Au-delà de cette disponibilité, le métier de relationniste demande par ailleurs une grande capacité d’organisation, d’adaptation et de réaction. Plus les attachés de presse passent de temps avec leurs clients, plus ils comprennent leurs projets et peuvent trouver des angles intéressants pour les présenter aux médias. « Ce sont des moments privilégiés qui, au final, aident à valoriser et à développer la culture locale », renchérit Jérémy Spellanzon.
« Nous offrons plus qu’un simple service. Nous incorporons la vision de nos clients, ce qui nous permet de proposer aussi un service-conseil plus adéquat que jamais à cause de la situation de la culture dans les médias », croit enfin Rosemonde Gingras. D’après elle, rester en permanence à l’affût et à l’écoute de son réseau de contacts et approfondir sa compréhension de l’architecture souterraine de la presse est fondamental. « C’est comme cela que l’on arrive à avancer en cohérence », conclut-elle. Ni plus ni moins.