L’ONU alarmée par la situation des enfants et la sécurité des humanitaires à Gaza

Un garçon est assis avec des jerrycans sur un rebord près des camps abritant des personnes déplacées par le conflit à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 25 juin 2024.
Photo: Eyad Baba Agence France-Presse Un garçon est assis avec des jerrycans sur un rebord près des camps abritant des personnes déplacées par le conflit à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 25 juin 2024.

Des agences de l’ONU ont tiré la sonnette d’alarme mardi sur la situation humanitaire dans la bande de Gaza dévastée par la guerre, affirmant que dix enfants y perdent une jambe ou deux quotidiennement et qu’un demi-million de Palestiniens souffrent de faim à un niveau « catastrophique ».

Au 9e mois de la guerre entre Israël et le Hamas palestinien, l’armée israélienne continue de bombarder par air et terre Gaza et d’y affronter les combattants palestiniens, en maintenant le siège de quelque 2,4 millions d’habitants dans le petit territoire.

« En gros, nous avons tous les jours 10 enfants qui perdent une ou deux jambes en moyenne. Dix par jour, ça veut dire environ 2000 enfants après plus de 260 jours de cette guerre brutale », a affirmé à Genève le chef de l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) Philippe Lazzarini.

Il a évoqué un rapport de l’ONG Save the Children selon lequel depuis le début de la guerre « jusqu’à 21 000 enfants sont portés disparus » à Gaza, soit parce qu’ils sont ensevelis sous les décombres, prisonniers, enterrés dans des tombes anonymes ou qu’ils ont perdu le contact avec leurs proches.

Survie

Un rapport du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC), sur lequel se base les agences de l’ONU, a souligné de son côté que l’ensemble de la bande de Gaza reste menacée par un « risque élevé et soutenu » de famine.

Il a précisé que 495 000 personnes souffraient toujours de la faim à un niveau « catastrophique » à Gaza, mais fait état d’une légère amélioration de la situation humanitaire dans le nord du territoire.

Pour Yasmina Guerda, coordinatrice humanitaire pour l’ONU à Gaza, les conditions de vie à Gaza « tiennent de la survie, et encore ». « Il n’y a plus un centimètre carré où l’on se sente en sécurité. »

Dimanche, le premier ministre israélien Benjamin Nétanyahou a annoncé que la phase « intense » des combats touchait à sa fin, notamment à Rafah où l’armée a lancé le 7 mai une offensive terrestre, mais que la guerre contre le Hamas se poursuivrait.

Il a répété que « l’objectif » était « de récupérer les otages » retenus à Gaza et de « déraciner le régime du Hamas », en place depuis 2007 et considéré comme terroriste par les États-Unis, l’Union européenne et Israël.

Conséquences désastreuses

Mardi, l’armée a annoncé avoir frappé à Gaza deux sites utilisés par le Hamas dont un à Chati, visant des combattants qui selon elle agissaient « dans des écoles » et étaient « impliqués dans la détention d’otages ».

Selon un correspondant de l’AFP, une frappe a fait cinq morts, dont deux enfants, près de l’hôpital al-Chifa à Gaza-Ville.

Dans le Sud, des frappes aériennes et des tirs d’artillerie ont visé des secteurs de Rafah, selon des témoins.

L’offensive de représailles israélienne a fait jusqu’à présent 37 658 morts, en majorité des civils, dont 32 ces dernières 24 heures, selon des données du ministère de la Santé du gouvernement de Gaza, dirigé par le Hamas.

Aide humanitaire en péril

De hauts responsables des Nations unies ont prévenu Israël qu’ils suspendraient les opérations d’aide dans la bande de Gaza à moins que des mesures urgentes ne soient prises pour mieux protéger les travailleurs humanitaires, ont déclaré deux responsables onusiens.

Une lettre de l’ONU envoyée ce mois-ci à de hauts responsables israéliens indiquait qu’Israël devait fournir aux travailleurs onusiens une communication directe avec les forces israéliennes sur le terrain dans la bande de Gaza, entre autres mesures, ont indiqué les responsables.

Ils se sont entretenus sous couvert d’anonymat pour discuter des négociations en cours avec des responsables israéliens. Les responsables de l’ONU ont déclaré qu’aucune décision définitive n’avait été prise quant à la suspension des opérations dans la bande de Gaza et que des pourparlers avec les Israéliens étaient en cours.

Les responsables militaires israéliens n’ont pas immédiatement répondu à une demande de commentaires.

Israël a reconnu certaines frappes militaires contre des travailleurs humanitaires, y compris une attaque en avril qui a tué sept travailleurs de l’organisation « World Central Kitchen », dont un Québécois, et a nié les allégations d’autres frappes.

Le Programme alimentaire mondial des Nations unies a déjà suspendu, pour des raisons de sécurité, l’acheminement de l’aide depuis une jetée construite par les États-Unis sur les rives de la bande de Gaza.

L’ONU et d’autres responsables humanitaires se plaignent depuis des mois de n’avoir aucun moyen de communiquer rapidement et directement avec les forces israéliennes sur le terrain, contrairement aux procédures habituelles – connues sous le nom de « coordination » – dans les zones de conflit à l’échelle mondiale pour protéger les travailleurs humanitaires des attaques des forces combattantes.

L’ONU et les travailleurs humanitaires se plaignent également de l’anarchie croissante dans la bande de Gaza et ont exhorté Israël à faire davantage pour améliorer la sécurité globale de leurs activités.

« Des missiles ont frappé nos locaux, bien qu’ils ne soient pas parties au conflit, a déclaré mardi Steve Taravella, porte-parole du Programme alimentaire mondial (PAM), l’une des principales organisations travaillant sur l’acheminement de l’aide humanitaire dans le territoire palestinien. M. Taravella n’était pas de ceux qui ont confirmé la menace de l’ONU de suspendre ses opérations sur tout le territoire.

« Les entrepôts du PAM ont été pris entre deux feux au cours des deux dernières semaines. »

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