Nordegg, le secret bien gardé des Rocheuses
Collaboration spéciale
Ce texte fait partie du cahier spécial Plaisirs
Ancienne reine du charbon, puis pratiquement devenue fantôme, la petite localité albertaine d’à peine une centaine de résidents permanents revit enfin. Située le long de l’autoroute David Thompson, au pied des Rocheuses, elle promet un contraste frappant avec les grands centres de villégiature auxquels les touristes sont habitués. Cap sur un diamant à polir qui se découvre une aventure à la fois.
Arrivée en fin de journée, on gare la Jeep sous de gros pins. Sur le terrain d’Expanse Cottages, le temps se perd dans les vastes espaces. La jolie Spoolmak, maisonnette fraîchement rénovée qu’on nous a assignée, est bien équipée. Et même si les habitations voisines ne sont pas très loin, la configuration du lieu fait en sorte qu’on se sent complètement isolé dans cette forêt dense. Un paysage découpé par de nombreux sentiers et peuplé de loups, que l’on entendra hurler une bonne partie de la nuit.
Au petit matin, les arbres dont on ne voit plus la cime baignent dans un épais brouillard délicatement percé par les rayons du soleil. Aujourd’hui, nous partons explorer la rivière Saskatchewan Nord pour une balade en radeau gonflable. Suivant le courant, la visite panoramique nous amène du parc national Banff jusqu’aux plaines de Kootenay, plus à l’est. Notre attachant guide, Ken Larlee, est un expert dont l’étendue des connaissances sur les environs, la rivière et les écosystèmes qu’elle traverse est sans égale.
Le territoire que l’on découvre est à peine marqué par l’humain. Annabelle Oung, coordinatrice de destination chez Explore Nordegg & Abraham Lake, nous avait prévenus. La région est pratiquement vierge et gagne graduellement l’intérêt des voyageurs à la recherche d’une expérience différente de ce que Canmore, Banff ou Jasper peuvent offrir. « Ici, on a accès aux Rocheuses brutes [dessinées par la nature] et non pas à des paysages qui ont été aménagés pour les touristes, comme c’est le cas au lac Louise, par exemple. »
La descente prend fin au lac Abraham, le plus grand lac artificiel de l’Alberta, créée en 1972 avec la construction du barrage Bighorn. On s’empresse d’emprunter la route pour profiter d’un meilleur point de vue sur cette vaste étendue d’eau turquoise qui s’étire sur plus de 30 kilomètres. Ici, en hiver, des visiteurs du monde entier s’y arrêtent pour photographier les spectaculaires bulles de gaz emprisonnées sous la glace et produites par des bactéries aquatiques qui expulsent du méthane.
Le deuxième jour s’amorce avec Jerry Holik, copropriétaire de Nature’s Gateway, un luxueux complexe d’hébergement qu’il dirige avec sa femme, Tanya Koshowski. Au guidon de notre vélo électrique, on s’enfonce dans la forêt en suivant les routes des nombreux anciens chemins de fer jusqu’au pont Taunton. Le coup de midi est marqué par un café au lait et une pointe de tarte au Miners Café, reconnu pour ses desserts faits maison, prêts à cuire ou à déguster sur place. Dans quelques semaines, lorsque la saison touristique sera lancée, les gens feront la queue pour goûter aux spécialités : gingembre, poire et bourbon, bleuets et mangue ou chocolat et beurre d’arachides.
Avant de prendre la route vers Calgary, on tricote un trajet sur les anciens chemins qui ceinturaient la mine, où quelques vestiges tiennent encore debout. Puis, au moment de quitter ce village isolé et à la vieille âme, on échange quelques mots avec un couple de retraités. Ce sont des habitués venus d’Edmonton pour tester leur swing sur le parcours de golf historique de neuf trous au centre de Nordegg. Déçus de nous voir partir si vite, ils insistent : « Il faut rester plus longtemps ! C’est l’endroit parfait pour arrêter le temps. »
Destination hors norme
Un arrêt à Nordegg, trésor caché qui refuse de croître trop vite, demande un peu de préparation. On recommande de faire ses achats à Banff, à Calgary ou à Edmonton avant de prendre la route à destination de ce joyau des Rocheuses. On peut se procurer des fruits et légumes frais, conservés dans un grand espace réfrigéré, au Beehive Artisans Market. Juste à côté, la station d’essence fait office de magasin général. On y trouve d’excellentes viandes scellées sous vide, des produits de base et des accessoires de camping. L’offre alimentaire est toutefois limitée et inégale.
Le principal défi pour les touristes qui souhaitent visiter l’endroit demeure celui du manque d’hébergement de type hôtel, reconnaît Annabelle Oung. « La plupart d’entre eux sont des locations de courte durée de type Airbnb ou Vrbo qui demandent un minimum de deux nuits. Il peut être difficile pour certains voyageurs de trouver ce qui leur convient. Nordegg est aussi un hameau de petite taille, donc le nombre de gîtes est limité. L’été, en général, tout est réservé assez longtemps à l’avance », dit-elle.
En rafale
Le Centre du patrimoine de Nordegg est l’un des musées industriels les plus complets du Canada. Nordegg abrite la première via ferrata de l’Alberta, créée par Girth Hitch Guiding. C’est aussi l’un des rares endroits où il est possible de survoler les Rocheuses en hélicoptère avec l’entreprise Rockies Heli. Finalement, la Nordegg Canteen est le point de départ et d’arrivée de plusieurs activités. On s’y arrête pour un sandwich, des frites ou une bière de microbrasserie qui serviront de ravitaillement pour les aventures à venir.
Le journaliste a été accueilli par Explore Nordegg & Abraham Lake.
Pour se rendre
Il n’y a pas de vols directs vers Nordegg, mais la localité est à moins de trois heures de route des aéroports internationaux de Calgary et d’Edmonton. La plus belle route d’accès est celle en provenance de Banff et de Jasper, soit la David Thompson Highway, l’autoroute 11, qui croise la promenade des Glaciers à Rocky Mountain House. Nordegg est situé à 225 km de Banff et à 245 km de Jasper.
Un peu d’histoire
Pendant plusieurs années, Nordegg fut l’un des principaux producteurs de charbon de l’Alberta. Nordegg, désigné lieu historique national du Canada en 2001, « a joué un rôle appréciable dans le développement ultérieur de l’industrie [du charbon] dans son ensemble en Alberta et dans le sud-est de la Colombie-Britannique. […] La mine, en exploitation de 1911 à 1955, était également associée à l’expansion du réseau de transport ferroviaire au début du XXe siècle ».
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