À grappiller pendant qu’il en reste

Jean Aubry
Collaboration spéciale
Photo: Getty Images

Ce texte fait partie du cahier spécial Plaisirs

Quelques vins à dénicher et à déguster avant qu’ils ne disparaissent des tablettes.

Terres d’Estandon 2022, Coteaux Varois en Provence, France (20 $ — 15168789)

Que je vous rassure, non, ce n’est pas mon premier rosé de la saison. À titre de membre fondateur du Mouvement de libération du rosé saisonnier (MLRS), je bois la vie en rose 12 mois par année. Cette cuvée bio m’en fournit une fois de plus l’occasion avec ses notes florales et fruitées particulièrement évocatrices. Mais c’est surtout la densité et le relief du toucher de bouche qui intéressent derrière une structure plutôt légère sur le plan du degré d’alcool. Un joli vin à servir déjà sur une pissaladière ou une quiche aux tomates. (5) ***

Gaba 2020, Telmo Rodriguez, Valdeorras, Espagne (21,25 $ — 11861771)

Comment ne pas tomber sous le charme du cépage mencia ? Il ne ressemble d’abord à rien d’autre, bien qu’il partage sa rondeur veloutée avec le merlot noir et ses nuances minérales d’ardoise chaude avec ses potes du Douro. Et ce, sans oublier de fines notes muscatées avec le cépage éponyme. On le retrouve ici à la fois bien mûr, peu acide, mais doté d’une touche d’amertume, pourvu de tanins serrés dont l’amplitude et la longueur étonnent. À ce prix, on se dépayse et on se régale. (5) ***

Disznókö Tokaji Dry Furmint 2022, Hongrie (23,15 $ — 13440700)

Les cépages de furmint et de chenin blanc ont plus d’un point de similitude du point de vue du caractère, comme de la singularité. Ils ont tous deux des nuances miellées, plus citronnées, et puis, cette vivacité naturelle, virant sur les amers et le salin en traçant des finales digestes. Leur déclinaison se révèle enfin dans des versions sans sucre, mais aussi celles plus moelleuses, riches et somptueuses. Cela, sans compter sur leur capacité commune à se bonifier en cave longtemps. J’adore les deux. Ce Disznókö nous revient en grande forme, précis, dense et généreux en fruits, porté par une insoutenable vitalité qui en démultiplie les horizons. Simplement superbe ! (5+) ***½

Condado de Haza Crianza 2020, Ribera del Duero, Espagne (27,20 $ — 978866)

Si on ne fait pas dans la dentelle, on ne fait pas non plus dans la contrefaçon. Tout y est redoutablement authentique. Un cépage, le tempranillo, noir comme une éclipse totale, mais aussi son environnement immédiat, sec et aride, qui donne l’impression au vin d’être en colère. Rassurez-vous cependant, l’élevage en foudre l’amadoue et le lisse, en ouvrant sur un bouquet d’épices et de dattes confites. (5+) ***1/2 ©

Beaumes de Venise « Bel Air » 2020, Rhonea, Rhône, France (29,25 $ — 15237035)

Je dégustais récemment une batterie de formidables vins rouges de la Vallée du Rhône, dont celui d’Élodie Balme, à Rasteau (retenez ce nom, car c’est de haut niveau ! 31 $ — 13551573) en me disant que les crus locaux étaient sous-estimés, du néophyte comme de l’amateur impénitent. Ce parcellaire Bel Air témoigne non seulement d’un équilibre d’ensemble irréprochable, mais également du constat que syrah et grenache noir dansent ici un tango aussi intime que réglé tels une montre suisse. Le fruité y est chavirant, fort fourni, enlevant et captivant en raison de tanins mûrs, abondants, veloutés et portés par une simplicité inespérée. C’est puissant, oui, mais sans sacrifier l’élégance. Mieux vaut le servir à peine rafraîchi. Y résister ? Impossible ! (5+) ***1/2 ©

Bourgogne Hautes-Côtes de Beaune 2022, Domaine Billard père et fils, Bourgogne, France (30,15 $ — 13239862)

Ils ont un petit côté canaille, les pinots noirs nichés dans les Hautes-Côtes, qui les rapprochent de ces beaux gamays aux sourires fendus jusqu’aux oreilles. Ils s’en apparentent par leur robe, leurs expressions aromatiques fines et florales que l’on croque en bouche pour leur fraîcheur et leur irrésistible éclat. Celui-ci est de cette étoffe, avec un grain fruité, un équilibre d’ensemble et une longueur qui ne lasse pas. On se régale ! (5) ***½

Sancerre « Cuvée La Grange Dîmière » 2018, Jean-Max Roger, Loire, France (32,25 $ — 13567647)

J’aime bien quand le pinot noir se « tasse » un peu. C’est comme s’il prenait du recul, en bonifiant quelque peu ses suggestions aromatiques tout en relâchant peu à peu une structure que la jeunesse lui avait habilement conférée au départ. Ce 2018 va dans ce sens, mais très, très lentement. Est-ce le millésime ? Toujours est-il qu’il combine une densité fruitée et une mâche impériale, fort tactiles, mais surtout savoureuses. Ce pinot a de la profondeur, de l’énergie, un pourtour parfaitement défini, un équilibre impeccable. Il gagnera même avec cinq autres années et plus à la cave ! À ce prix, tout de même à 50 % moins cher qu’un beaunois 1er cru ! (5+) **** ©

Sancerre « La Villaudière » 2022, Jean-Marie Reverdy & fils, Loire, France (34 $ — 15302909)

Ce vin est tour à tour intense et volubile, jasant buis ou feuille de tomate froissée. Il a un goût fumé, parfois exotique, herbacé et poivré ou, à l’inverse, plus discret, mais fin. Des saveurs claironnant la poire, la pomme, le lys blanc, le citron et le silex sur un ensemble à la fois délicat et vibrant, toujours réjouissant. La maison Reverdy nous propose la deuxième option : un sauvignon primesautier, fort gracieux, mais dont on aurait peut-être souhaité un chouïa de profondeur en prime, bien que le chèvre chaud en salade, lui, s’en foute complètement. (5) ***

Château Le Puy « Rose Marie » 2022, Vin de France (71 $ — 14046317)

Le prix fera rosir les joues et les oreilles, mais ce rosé élaboré en bio sans anhydride sulfureux bouscule les conventions. Il s’impose avec une sève, un panache et une présence qui le distingue nettement des autres vins de ce type sur le marché. Un pur merlot prélevé par saignée lors de sa fermentation en cuve pour ensuite être terminé en fût, où il affine sa dynamique pendant quelques mois avant d’être mis en bouteille. Côté ambiance, c’est un poème célébrant des jardins en fleurs où les arbres fruitiers ploient sous leur propre poids lors de ces chaudes journées de juillet gagnées par une averse inattendue. À l’image des vins proposés par Le Puy, ce rosé de gastronomie inspire et charme avec son moelleux de bouche qu’une sève généreuse, mais élégante, nourrie longuement jusqu’en finale. Chacune des gorgées est une ode à la vie, celle de tous les jours, mais aussi à la vie spirituelle. Un vin vivant et nourrissant, à tous les points de vue. Partagez l’expérience, mais faites vite, les allocations de ce vin à la SAQ sont limitées ! Mets thaïlandais, dimsums, salade de betteraves, pétoncles grillés aux agrumes. (5+) ****1/2

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.

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