Des examens en pleine canicule dans les écoles du Québec
Les épreuves ministérielles qui se tiennent cette semaine dans les écoles secondaires du Québec ne seront pas vécues de façon « uniforme » par les élèves de ce niveau, constatent des enseignants. Ils déplorent l’absence d’un système de climatisation dans de nombreux établissements de la province au moment où celle-ci est balayée par une vague de chaleur.
L’école secondaire Nikanik, située sur le territoire attikamek de Wemotaci, en Mauricie, fermera ses portes pour une deuxième journée de suite, mercredi, en raison de la chaleur accablante, la température ressentie devant y dépasser de nouveau les 40 degrés en après-midi, comme ce sera le cas dans plusieurs autres régions du Québec. Seuls les examens du ministère prévus ces deux journées ont été maintenus, et ils auront lieu dans un des deux seuls locaux climatisés de l’école, puisqu’il est « impossible d’annuler » ou de déplacer ces épreuves, a indiqué l’école sur Facebook mardi en fin d’après-midi. « Les examens annulés ne seront pas repris étant donné la fin de l’année scolaire », ajoute l’établissement.
« Devant la vague de chaleur extrême, il ne nous apparaissait pas nécessaire de continuer nos activités et nos évaluations dans ce cadre-là », explique en entrevue au Devoir le directeur de l’école de 150 élèves, David Gascon. Autrement, si des examens locaux de science et d’histoire avaient été tenus comme prévu mardi et mercredi dans des locaux « non climatisés » de l’établissement, les résultats obtenus par les élèves auraient été minés par la température « très désagréable » qui y règne, estime le directeur. « L’objectif, c’est de vérifier les acquis des élèves dans les meilleures conditions », ajoute M. Gascon, qui a donc préféré annuler ces évaluations.
Un effet sur la réussite
Les centres de services scolaires de Montréal, de Laval et de Longueuil contactés par Le Devoir ont pour leur part confirmé que leurs écoles demeuraient ouvertes cette semaine. Certains établissements accueillant des élèves du primaire ont toutefois modifié les activités proposées, en annulant par exemple des compétitions sportives qui se seraient tenues sous un soleil de plomb pour privilégier des sorties dans les jeux d’eau que l’on trouve notamment dans plusieurs parcs municipaux, à Montréal comme ailleurs.
Dans les écoles secondaires, cependant, il s’avère difficile pour les directions de faire preuve d’imagination, puisque des épreuves ministérielles valant 20 % de la note finale des élèves y ont lieu jusqu’à jeudi. Un fossé se creuse ainsi entre les écoles ayant accès à l’air climatisé et celles qui doivent se rabattre, pour rafraîchir l’air ambiant, sur des ventilateurs sur pied de même que sur l’ouverture des portes et des fenêtres des classes.
À lire aussi
« C’est une épreuve uniforme, mais on n’a pas les conditions uniformes pour la passer », lance ainsi Marion Miller, qui enseigne dans une école secondaire de Montréal sans système de climatisation, où le mercure a grimpé mardi. « On demande aux élèves de se lever plus souvent remplir leur gourde », mais ça ne crée pas « un contexte qui est juste pour leur apprentissage », se désole cette enseignante.
« Dans plein d’écoles au Québec, les jeunes ont de la difficulté à se concentrer [en raison de la chaleur]. Ils vont vouloir sortir le plus vite possible de leur classe », alors que les écoles devraient normalement offrir des conditions optimales aux élèves pour qu’ils réalisent leurs examens, lance pour sa part l’enseignant dans une école secondaire de Chaudière-Appalaches Sylvain Duclos. Or, « ça peut avoir un impact très important sur la réussite des jeunes », fait-il valoir.
Une climatisation qui « change la donne »
L’éducatrice spécialisée Lisvé Rodriguez se réjouit pour sa part de travailler cette année dans une école climatisée de Montréal-Nord. Jointe par Le Devoir mardi, elle raconte avoir précédemment travaillé dans des établissements de la métropole qui ne sont pas climatisés et où les effets des canicules se font donc particulièrement sentir. « Quand il y a de la chaleur, les élèves sont beaucoup plus fatigués, et pour nous, comme employés, c’est plus difficile de faire nos tâches », souligne Mme Rodriguez. À l’inverse, les élèves de son école actuelle « sont beaucoup plus concentrés », puisque la température des locaux n’y est pas étouffante.
La climatisation des écoles, « ça change la donne », relève ainsi Sylvain Duclos, qui déplore que le gouvernement du Québec ne semble pas faire de cette question une priorité. « On a l’impression que c’est toujours remis à plus tard et que ça n’avance pas, ce dossier-là », soupire l’enseignant.
Un constat que partage Patricia Clermont, qui est porte-parole du mouvement Je protège mon école publique. « Les Mr. Freeze et l’eau, ça ne suffit pas », lance-t-elle, ajoutant qu’« il n’est pas acceptable qu’une communauté autochtone doive fermer une école » en raison de la chaleur, comme c’est le cas à Wemotaci. Selon elle, « ça prend des politiques » afin que les écoles soient prêtes à faire face aux nouvelles vagues de chaleur qui pourraient survenir à la prochaine rentrée scolaire, cet automne.