«Géante!»: l’avenir appartient à la jeunesse
La colossale structure à l’allure humaine imaginée par Michel Otis et réalisée par l’entreprise Scène éthique est de retour sur l’esplanade PVM de Place Ville Marie pour un troisième été. Présenté gratuitement à l’occasion du festival Montréal complètement cirque, le spectacle de cette année s’intitule Géante ! Signée Gypsy Snider, cofondatrice et directrice artistique des 7 doigts, la création met en vedette onze danseurs et acrobates.
Avant même que ce soit commencé, la vision enchante ! Derrière le personnage d’acier de presque 16 mètres de hauteur est suspendu l’anneau de 30 mètres de diamètre conçu par Claude Cormier. Tout autour se dressent les gratte-ciel du centre-ville. Et en arrière-plan, splendeur suprême, un échantillon de la masse verdoyante du mont Royal. Si vous assistez à la représentation de 18 h, vous aurez la chance d’embrasser autant de beauté en un seul regard. Si vous êtes plutôt là pour celle de 21 h 30, vous pourrez apprécier pleinement les éclairages de Julie Basse, peu visibles avant le coucher du soleil.
Pétri d’urbanité, comme imprégné du quartier où il se déroule, avec tout ce que cela implique d’individualisme, de cohue, de complet veston et de dépendance aux écrans, le spectacle de 30 minutes s’articule autour d’une enfant qui incarne l’avenir et l’espoir, une petite qui n’aura d’autre choix que de se faire géante pour surmonter les défis colossaux que lui posera certainement le monde. Le récit est mince, soutenu par une narration bilingue préenregistrée, mais l’essentiel n’est pas là.
Au coeur du spectacle est un véritable joyau : Adeline Cruz, qui tient le rôle principal. Âgée de 10 ans, la danseuse est adepte du krump, une danse urbaine issue des communautés afro-américaines de Los Angeles. Sur les chorégraphies de Jr Maddripp, l’enfant brûle les planches. Devant tant d’engagement physique, une telle expressivité, sans parler de sa voix chantée, dont on peut apprécier la richesse et l’étonnante maturité en direct, on lève très haut notre chapeau ! Pour vous donner une idée de la fascination que Cruz provoque, pensez à Maddie Ziegler, l’extraordinaire fillette découverte dans quelques clips de Sia.
Bien qu’elle soit essentiellement là pour lier entre eux les numéros de cirque, la danse — frénétique, viscérale, envoûtante — est de loin ce qui est le plus enthousiasmant. Sur les musiques irrésistibles de Colin Gagné, où il arrive que se posent les voix de Sarahmée et de Frannie Holder, entourés de toute la troupe, que les costumes de Camille Thibault-Bédard achèvent de constituer en communauté, Adeline Cruz et Wh!Mz, véritables vedettes du spectacle, captivent du début à la fin.
Exécutés dans la scénographie étagée conçue par Ana Cappelluto, étonnamment bien davantage que dans le personnage d’acier qui surplombe la scène, les numéros de cirque sont rigoureusement accomplis, mais peu mémorables, hormis quelques exceptions, comme la performance époustouflante de Nathan Sterchi, Léonard Meylan, Lily-Claire Major-Varallo et Clara Laurent à la planche coréenne. Dans le dernier tableau, de toute beauté, Adeline Cruz paraît flotter au-dessus des nuages. Quand le rideau tombe sur Géante !, on se jure de suivre dorénavant, où qu’elle aille, cette artiste promise à un avenir reluisant.