Une centaine de films marquants de la science-fiction à la Cinémathèque
Pour son traditionnel cycle d’été, qui a par le passé été consacré à l’horreur ou à l’érotisme, la Cinémathèque québécoise propose cette année un voyage à travers le temps et les dimensions : la science-fiction sera à l’honneur du 2 juillet au 25 août dans les salles de cette institution montréalaise.
Le genre incarne un véritable incubateur des angoisses du temps : intelligence artificielle, migrations, changements climatiques, rapport à l’Autre se déploient de différentes manières dans chaque film.
Le programme du cycle comprend évidemment les grands classiques, comme 2001 : L’odyssée de l’espace (Stanley Kubrick, 1968), La planète des singes (Franklin J. Schaffner, 1968), Soylent Green (Richard Fleischer, 1973), Blade Runner (Ridley Scott, 1982), 1984 (Michael Radford, 1984), Retour vers le futur (Robert Zemeckis, 1985), The Matrix (Lana et Lilly Wachowski, 1999) ou Arrival (Denis Villeneuve, 2016).
Le processus de sélection est périlleux, puisque le très vaste répertoire de ce cinéma regorge de pépites. « Pour choisir les films présentés dans le cycle d’été, j’établis une première grande liste, que je présente ensuite aux quatre membres du comité de programmation, qui y ajoutent des titres », explique Marcel Jean, directeur général de la Cinémathèque, rencontré cette semaine aux locaux de l’organisme.
Les films de cette première liste collective — plus de 250 y figuraient cette année — sont ensuite triés selon divers critères, allant des préférences personnelles des programmateurs à la dimension historique ou éducative de l’oeuvre, en passant par les contraintes techniques ou la surreprésentation de certains auteurs. Après avoir fait un premier élagage, Jérôme Michaud, adjoint à la programmation, part à la recherche de copies. Certaines sont introuvables, d’autres endommagées. Parfois, des cinémathèques étrangères rappellent l’existence de pellicules anciennes, mais pratiquement neuves.
La science-fiction est aussi vieille que le 7e art lui-même. Le voyage dans la lune, de Georges Méliès, a lancé le bal en 1902. « La science-fiction a pris son essor après la Deuxième Guerre mondiale, mais surtout dans les années 1970, à travers toute l’anxiété qui découlait de la guerre froide, de la question nucléaire et de la peur des extraterrestres », note M. Jean.
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De ces craintes ont émergé des oeuvres entrecroisant l’air du temps à des projections futuristes qui trouvent étrangement leur écho aujourd’hui. C’est le cas de Terminator (James Cameron, 1984), film postapocalyptique qui exploite tant la figure de l’Autre que les menaces de l’intelligence artificielle ou la peur de la fin du monde.
Marcel Jean parle du genre comme d’un « ferment » : cette étrange créature artistique vivote avec persistance, se transforme, étonne par son résultat — et peut dépasser largement le seul cadre de son époque.
Quelques oeuvres rares figurent aussi à ce programme estival. « On a une copie pellicule de 12 Monkeys [Terry Gilliam, 1995], qui va ouvrir le cycle, en double programme avec La jetée [Chris Marker, 1962]. Je trouve intéressant de les mettre côte à côte, car l’un a inspiré l’autre », souligne Marcel Jean.
Des films soviétiques assez anciens, « de belles curiosités », selon le directeur de la Cinémathèque, seront également présentés. C’est le cas de L’auberge de l’alpiniste mort (Grigori Kromanov, 1979). Adapté du roman du même nom des frères Strougatski (1970), ce récit d’enquête se déroule dans un hôtel jouxtant une station de ski, où les clients se retrouvent coincés à cause d’une avalanche.
Born in Flames (Lizzie Borden, 1983) est un coup de coeur pour M. Jean. Cette utopie féministe est, selon lui, un bel exemple du cinéma indépendant de cette époque. Mimant le style documentaire, le long métrage suit trois groupes féministes s’opposant au gouvernement socialiste en place depuis trop longtemps.
Des films québécois sont aussi sélectionnés. Polaris (Kirsten Carthew, 2022), par exemple, se déroule dans un décor hivernal, qui tranche avec les déserts ou les galaxies, prisés par le genre. Son histoire originale met en scène Sumi, jeune enfant élevée par une ourse polaire en l’an 2144. Blade Runner 2049 (Denis Villeneuve, 2017) sera aussi présenté.
Le cycle se terminera par un programme spécial sur Steven Spielberg (Rencontres du troisième type, E.T., etc.) et George Lucas (Star Wars), consacré aux premiers films de ces icônes du cinéma américain et du genre.