L’abattage de cerfs du parc Michel-Chartrand aura lieu à l’automne 2024
La Ville de Longueuil maintient le cap et procédera à l’abattage d’une centaine de cerfs au parc Michel-Chartrand à l’automne 2024, a annoncé mercredi la mairesse Catherine Fournier. Les opposants au projet continuent toutefois de dénoncer la « mort atroce » qui attend les cervidés lors de cette chasse contrôlée à l’arbalète.
Alors qu’elle présentait le plan de gestion de la surpopulation de cerfs, mercredi, Catherine Fournier a souligné que la Ville n’avait pas le choix d’aller de l’avant pour rétablir l’équilibre écologique du parc Michel-Chartrand, durement éprouvé par le broutage intensif fait par ces cerfs.
Les démarches judiciaires qui ont duré deux ans obligent la Ville à redéposer une demande de permis auprès du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) et de lancer un appel d’offres pour la chasse contrôlée à l’arbalète qui sera confiée à des chasseurs professionnels. Le permis à des fins scientifiques, éducatives ou de gestion de la faune sera délivré pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2024.
La Ville prévoit fermer l’accès au parc Michel-Chartrand pour plusieurs jours à la fois à l’automne 2024 afin de mener l’opération. Un coordonnateur sera présent pour s’assurer de la bonne marche de la chasse et sera épaulé par une firme de sécurité. Le Service de police de l’agglomération de Longueuil assurera pour sa part la sécurité à l’extérieur du périmètre du parc.
Le vice-président du comité exécutif de la Ville, Jonathan Tabarah, a indiqué que la situation du parc Michel-Chartrand était « critique ». « À taille d’homme, il n’y a plus de nourriture », a-t-il dit, en rappelant que l’inventaire de 2023 avait révélé que l’espace vert d’une superficie de 1,9 km² comptait 117 cerfs, alors qu’un parc de cette taille ne peut soutenir qu’une quinzaine d’individus au maximum. « La surpopulation leur nuit eux-mêmes », a-t-il dit.
Un inventaire régional des cerfs sera réalisé en février par le MELCCFP. À ce moment, la Ville saura combien de cervidés devront être abattus et présentera un plan plus détaillé de l’opération de l’automne. Mais l’objectif est de réduire la population à 10-15 individus, a rappelé Louis-Pascal Cyr, porte-parole de la Ville de Longueuil.
Les opposants manifestent
Pendant que la Ville présentait son plan, mercredi, un petit groupe d’opposants manifestait à l’extérieur de l’hôtel de ville.
« Ces cerfs ne sont pas malades du tout. Ils auraient pu facilement être transportés et être stérilisés, a fait valoir la citoyenne Nathalie Moseley. Ce sont des cerfs qui sont semi-domestiqués dans un parc urbain, en plein milieu d’une ville. Ça va être une mort atroce pour eux. On ne peut pas croire qu’en 2023, on va gérer une population de cerfs de cette façon-là. C’est très décevant. »
La semaine dernière, la Société des établissements de plein air du Québec (SEPAQ) avait annoncé avoir abattu à l’arme à feu un total de 399 cerfs de Virginie dans les parcs nationaux des Îles-de-Boucherville et du Mont-Saint-Bruno afin de réduire la surpopulation dans ces deux milieux naturels protégés.
L’opération n’a pas suscité le même émoi que celle que mènera la Ville de Longueuil, un phénomène que Jonathan Tabarah n’arrive pas à comprendre. « Il y a 50 000 cerfs qui sont abattus chaque année au Québec. Je ne vois pas du tout les mêmes manifestations se produire pour les autres cerfs. » Il soutient que les résidents de son district sont exaspérés par l’attente due aux procédures judiciaires et les mouvements d’opposition. « On sait que c’est une très petite minorité de citoyens qui se battent contre les mesures qui sont approuvées par la science », a-t-il affirmé.
La SEPAQ a eu recours aux armes à feu pour mener son opération d’abattage. Longueuil maintient son choix de la chasse à l’arbalète, mais n’écarte pas la possibilité d’examiner d’autres options.
Des menaces contre la mairesse
L’abattage de cerfs à Longueuil suscite de vives tensions. La mairesse Fournier et Jonathan Tabarah ont fait l’objet de menaces en lien avec ce dossier. L’inspecteur Gino Iannone, du Service de police de l’agglomération de Longueuil, a d’ailleurs confirmé que deux enquêtes étaient en cours à ce sujet et que la mairesse Fournier bénéficiait d’une protection policière.
« Je l’ai dit, je le redis, ce n’est pas de gaieté de coeur que la Ville planifie cette opération, a expliqué la mairesse Fournier en mêlée de presse. On comprend que c’est un enjeu qui est sensible, qui est délicat. Nous avons eu l’occasion, Jonathan [Tabarah] et moi, de rencontrer plusieurs groupes, quelques citoyennes et citoyens qui se posent des questions, des questions qui sont légitimes. On a toujours eu un dialogue ouvert avec la population. »
La mairesse n’a pas été en mesure de préciser les coûts de l’opération d’abattage. La saga judiciaire a toutefois entraîné des frais de 375 000 $ pour la Ville, a-t-elle dit. Rappelons qu’en octobre dernier, le juge Robert Mainville, de la Cour d’appel, avait rejeté la requête de l’organisme Service sauvetage animal et de la citoyenne Florence Meney, qui voulaient faire annuler la décision du MELCCFP d’autoriser la Ville de Longueuil à abattre des cerfs.
Montréal aussi est aux prises avec une surpopulation de cerfs, notamment au parc-nature de la Pointe-aux-Prairies, et attendait une décision des tribunaux pour agir. « On suit ce qui se passe à Longueuil et leur façon de faire. Ils sont passés au travers d’un processus judiciaire et, évidemment, ce sont des choses qu’on va prendre en considération si on devait nous aussi proposer une solution concernant la surpopulation des cerfs de Virginie », a déclaré mercredi la mairesse Valérie Plante.
Avec Zacharie Goudreault