250 000 Palestiniens appelés à évacuer le sud de la bande de Gaza

Une femme tient un bébé enveloppé dans une couverture alors que les Palestiniens déplacés quittent une zone à l’est de Khan Yunis après que l’armée israélienne a émis un nouvel ordre d’évacuation pour certaines parties de la ville et de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza.
Photo: Bashar Taleb Agence France-Presse Une femme tient un bébé enveloppé dans une couverture alors que les Palestiniens déplacés quittent une zone à l’est de Khan Yunis après que l’armée israélienne a émis un nouvel ordre d’évacuation pour certaines parties de la ville et de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza.

Des milliers de familles palestiniennes ont fui mardi plusieurs secteurs du sud de la bande de Gaza, poussées sur les routes après un ordre d’évacuation de l’armée israélienne qui fait craindre une nouvelle opération militaire d’envergure contre le Hamas.

Environ 250 000 personnes, selon l’ONU, sont appelées à évacuer depuis lundi des secteurs de l’est de Rafah et de Khan Younès, contraintes de repartir en quête d’eau, de nourriture et d’abris à travers le territoire dévasté par près de neuf mois de guerre entre Israël et le mouvement islamiste palestinien.

Mardi, par des températures avoisinant les 30 degrés, des familles déplacées fuyaient à pied ou entassées dans des voitures et des remorques surchargées, au milieu des ruines poussiéreuses de Khan Younès, la plus grande ville du sud de la bande de Gaza. Certains avaient dormi dehors, ne sachant où aller.

Cet appel est « le plus important depuis octobre, quand les habitants du nord de Gaza avaient reçu l’ordre d’évacuer » leur domicile aux premiers jours de la guerre, a souligné le bureau des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA), ajoutant que l’ordre lancé lundi concernait un territoire de 117 kilomètres carrés, soit un tiers de la superficie de la bande de Gaza.

« Une évacuation à une échelle aussi massive ne fera qu’accroître les souffrances des civils et les besoins humanitaires », a averti l’OCHA.

Des frappes aériennes, selon des témoins, ont visé Khan Younès, d’où l’armée israélienne s’était retirée début avril après une bataille de plusieurs mois. Des sources médicales ont fait état d’au moins huit morts et d’une trentaine de blessés dans ce secteur.

« Nous ne savions pas où aller et nous n’avons pas assez d’argent pour acheter une nouvelle tente », a raconté Ahmed al-Najjar, un homme de 26 ans habitant Bani Suheila, une des localités concernées. « Nous avons dû passer la nuit dans la rue et cela a augmenté notre stress. Ce matin, nous avons décidé de retourner à la maison », a-t-il ajouté.

Israël n’a pas indiqué s’il y aurait une nouvelle opération d’envergure dans le sud de Gaza, mais ses ordres d’évacuation sont généralement un préambule à d’intenses combats.

Le président français, Emmanuel Macron, a appelé mardi le premier ministre israélien, Benjamin Nétanyahou, à ne pas engager de « nouvelle opération » près de Khan Younès et de Rafah.

1,9 million de déplacés

Au total, 1,9 million d’habitants de la bande de Gaza sont à présent déplacés, soit 80 % de la population, a déclaré mardi la coordinatrice humanitaire de l’ONU pour le territoire, Sigrid Kaag, qui s’est dite « vivement préoccupée » par le nouvel ordre d’évacuation.

Cet ordre fait suite à des tirs de roquettes lundi vers Israël, revendiqués par le Djihad islamique, un groupe armé palestinien allié du Hamas.

Après avoir progressé depuis le nord de la bande de Gaza, l’armée a lancé le 7 mai une opération terrestre à Rafah, une ville frontalière avec l’Égypte, alors présentée comme l’ultime étape de la guerre contre le Hamas.

Mais, ces dernières semaines, les combats ont repris avec intensité dans plusieurs régions que l’armée avait dit contrôler, notamment dans le nord.

L’armée a affirmé mardi poursuivre ses opérations à Choujaïya, dans le nord, dans le centre de la bande de Gaza ainsi qu’à Rafah. Elle a annoncé avoir éliminé de « nombreux terroristes » à Choujaïya, un quartier est de la ville de Gaza, où elle a lancé le 27 juin une opération qui a poussé, selon l’ONU, entre 60 000 et 80 000 personnes à fuir.

Photo: Bashar Taleb Agence France-Presse Des Palestiniennes font la queue pour obtenir du pain, à Deir el-Balah, au centre de la bande de Gaza.

« Un abîme de souffrance »

La guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque sans précédent menée par des commandos du Hamas infiltrés dans le sud d’Israël depuis Gaza, qui a entraîné la mort de 1195 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

Sur les 251 personnes enlevées durant l’attaque, 116 sont toujours retenues en otages à Gaza, parmi lesquelles 42 sont mortes, selon l’armée.

En riposte, l’armée israélienne a lancé une offensive dans la bande de Gaza, qui a fait jusqu’à présent 37 925 morts, en majorité des civils, selon des données du ministère de la Santé du gouvernement de Gaza, dirigé par le Hamas.

Benjamin Nétanyahou a promis de détruire le Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007 et considéré comme une organisation terroriste par les États-Unis, l’Union européenne et Israël.

Il a réaffirmé mardi que la guerre se terminerait une fois tous les objectifs « atteints », « dont la destruction du Hamas et la libération de tous les otages ».

Réagissant à des déclarations anonymes reprises selon lui dans le journal américain The New York Times, indiquant qu’Israël serait prêt à mettre un terme à la guerre sans avoir atteint ses objectifs, M. Nétanyahou a assuré que cela « n’arriverait pas ». « Nous ne succomberons pas aux sirènes du défaitisme », a-t-il dit, selon son bureau.

Le chef d’état-major israélien, le général Herzi Halevi, a reconnu qu’il s’agissait « d’une campagne longue », à laquelle « beaucoup de volonté, de patience et de persévérance » permettraient d’apporter des résultats.

La guerre a provoqué un désastre humanitaire dans le petit territoire assiégé, où l’eau et la nourriture manquent, où l’aide arrive en quantité insuffisante.

« Les civils palestiniens de Gaza sont plongés dans un abîme de souffrance. Leur vie est brisée », a déclaré mardi Sigrid Kaag. « La guerre n’a pas uniquement créé la plus profonde des crises humanitaires. Elle a déclenché un maelstrom de misère humaine », a ajouté la responsable de l’ONU.

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